Situation actuelle en Libye
On apprend qu’en Libye les bombardements aériens massifs de l’OTAN se poursuivent sans répit. Il est fait état d’environ 20 000 attaques aériennes depuis le début de l’agression. À Tripoli, les antennes de l’émetteur de télévision ont été en grande partie paralysées depuis le 29 juin 2011 par suite de la destruction de trois satellites au cours d’une attaque.
Le but de l’OTAN est d’empêcher le reste du monde d’être informé sur l’opinion publique à Tripoli. Les médias occidentaux établis n’ont eux aussi plus guère le droit de faire allusion à la Libye. Les infos quotidiennes à Tripoli ont par exemple fait mention le 9 août dernier d’attaques aériennes de l’OTAN ayant causé la mort de 85 paisibles habitants, dont 33 enfants, dans un village proche de la ville de Slitan, Majer.
Les attaques aériennes de l’OTAN ont d’ores et déjà fait plusieurs milliers de victimes civiles.
Mais de cela non plus les médias occidentaux ne disent mot.
Cette répression de la liberté d’information et d’opinion prend aussi la forme de certains refus d’entrée à des journalistes libyens, d’une manière analogue aux sanctions contre la Biélorussie. Elle est typique de la répression de la liberté d’opinion, de diffusion d’opinion et d’information en Occident !
Lorsque certaines opinions et informations contrarient les puissants, on empêche tout simplement certaines stations de télé ou de radio d’émettre, on interdit des revues, journaux ou autres organes d’information, ou encore on refuse de laisser entrer certains journalistes ou publicistes qui déplaisent ou de publier leurs articles. Voilà comment cela se passe. Ce que les gens ne doivent pas voir et entendre, ce que le peuple ne doit pas savoir, on le passe sous silence, par violence ou en fermant le robinet aux billets.
De la même manière, des ambassadeurs accrédités par le gouvernement libyen officiel ont été chassés de Londres, Sofia, Berlin et autres capitales européennes et n’ont plus accès à leurs ambassades.
Peu de temps après le début des bombardements de l’OTAN, les gouvernements occidentaux ne laissaient plus entrer que des représentants du gouvernement de transition libyen, aussitôt reconnu par l’Occident !! Les représentants légaux de la Libye n’ont plus le droit de siéger qu’à l’ONU.
Les pères fondateurs e cette organisation doivent se retourner dans leur tombe !!
En Libye, les attaques aériennes et les mercenaires étrangers infiltrés dans le pays par suite de la destruction des infrastructures ainsi que les sanctions prises par l’Occident ont déclenché des catastrophes humanitaires, alors que celui-ci a l’hypocrisie de prétendre agir pour protéger la population libyenne !
C’est l’un des plus gros mensonges de toute l’histoire du monde que d’avoir prétendu que Kadhafi avait donné l’ordre de tirer sur sa propre population et de la bombarder. Il n’y a pas un mot de vrai !
Mais cela justifiait l’agression de la Libye et de son peuple.
La guerre contre la Libye pour protéger la population du pays - pas de pire mensonge des bellicistes depuis des siècles. Ne lui est comparable que le mensonge de Hitler à Gleiwitz, qui avait raconté en septembre 1939 que les Polonais avaient attaqué l’Allemagne, contraignant celle-ci à riposter, ce qui avait déclenché la Deuxième guerre mondiale.
Thomas C. Mountain écrit que les mensonges au sujet de la guerre en Libye sont pires que ceux qui ont été faits au sujet de l’Irak ;
L’impudence et l’aplomb des mensonges des bellicistes sont vraiment stupéfiants et l’on peut être surpris du degré de stupidité, de crédulité et de naïveté que les politiciens et les médias prêtent à leur public, de quelle bêtise ils le créditent.
On ne peut s’empêcher de se demander combien de fois il arrive aux politiciens et médias de rire et plaisanter de leurs propres mensonges et de les couvrir de sarcasmes.
On peut aussi s’étonner que l’OTAN et les USA aient méprisé aussi effrontément les rappels par une majorité d’États - par exemple la Chine, la Russie, l’Union africaine ou encore le Brésil - qu’ils agissaient en violation des résolutions 1970 et 1973 de l’ONU.
Des documents de Wikileaks éclairent les dessous de l’intervention en Libye, soutenue par les USA, et montrent que les USA visent uniquement à une totale mainmise sur les ressources libyennes en pétrole et gaz naturel et à une maximisation des profits de leurs firmes énergétiques ainsi qu’à la mise à l’écart des concurrents intéressés par l’accès aux matières premières libyennes et à leur extraction: RP de Chine, Russie, Inde Brésil, Afrique du Sud mais aussi Italie, Allemagne ou Turquie.
Cependant les politiciens occidentaux ne parlent que d’une guerre menée pour promouvoir les droits humains, la démocratie et les intérêts du peuple libyen. Mais toute cette rhétorique de protection de la population libyenne n’est destinée qu’à dissimuler les véritables raisons de cette guerre.
Cette guerre n’a d’autre but que de voler au peuple libyen sa part légitime des bénéfices tirés du commerce international, part qui s’élevait à plus de 80% sous la conduite de Kadhafi, tant que le gouvernement de ce dernier décidait encore de l’attribution des concessions et négociait librement et souverainement les contrats d’extraction du pétrole et du gaz naturel et de leur exportation !
Les USA haïssaient Kadhafi car
-il apportait un soutien décisif à la Banque islamique, dont le but était de rendre l’Afrique indépendante du FMI et des banques dominées par Washington et visait à créer une devise proprement africaine, le dinar d’or ;
-qu’il projetait la construction d’un système de puisage des énormes réserves d’eau douce contenues dans le sous-sol du désert libyen pour assurer l’approvisionnement en eau et la mise en culture non seulement de toute la Libye, mais aussi d’autres pays africains, visant à rendre toute l’Afrique indépendante de l’importation de blé états-unien et ainsi à se libérer de l’emprise politique des USA lors de votes à l’ONU ;
-qu’il avait doté sa population d’un système de santé, d’éducation et des logements gratuits, d’un système de retraite garantissant des retraites réelles plus élevées qu’aux USA, d’un développement agricole exemplaire, et de bien d’autres avantages pour les masses populaires, avec un effet d’entraînement non seulement sur tout le continent africain, mais pour le monde entier
La guerre en Libye sert à abolir tout cela et à utiliser les bénéfices pour la maximisation des profits des grandes firmes énergétiques anglo-américaines, l’enrichissement astronomique des oligarques de la finance et la stabilisation du dollar !
Dans cette optique, le Président reconnu de la Libye, Djibril, a déjà été chargé de nationaliser dans un premier temps tous les secteurs pétrolifères avec leurs installations pour les remettre ensuite aux firmes énergétiques agréées par Washington.
Dans son article « Guerre coloniale contre l’Afrique », -en particulier dans la deuxième partie intitulée « La guerre contre la Libye. Un combat pour s’approprier les richesses du pays et la domination de tout le continent », paru dans „junge Welt“ le 28 juillet 2011, Joachim Guilliard a analysé de façon détaillée les véritables motifs de la guerre menée par l’OTAN en Libye.
Des centaines c’autres articles du même type exposent les motifs et les dessous de la guerre en Libye, mais les politiciens occidentaux et les médias à leur botte continuent leurs mensonges gros comme des maisons. Ils ne respectent même plus les règles élémentaires de logique auxquelles s’étaient jusqu’ici tenus même les pires menteurs.
Ces débats idéologico-militaires autour de la Libye ont aussi montré que les investisseurs des firmes qui exploitaient le pétrole et le gaz libyens parce que Kadhafi leur avait accordé les concessions relevaient de deux types fondamentaux.
Les premiers s’intéressaient au premier chef aux matières premières plutôt qu’aux profits. C’est pourquoi la Chine était relativement généreuse dans la réversion des bénéfices à l’État libyen. Elle s’intéressait surtout au gaz et au pétrole en eux-mêmes.
Les seconds couplaient - et couplent toujours - leur intérêt pour le pétrole et le gaz à une recherche incontournable de profits élevés. Des pays comme les USA, la Grande-Bretagne et la France ont aussi pour but de faire contribuer les profits maximum tirés de l’exploitation et de la transformation du gaz et du pétrole au sauvetage du dollar ou de l’euro.
En février, sous les acclamations des médias occidentaux, un Conseil national de transition et un État-major suprême d’une prétendue Armée de libération (également connue sous le nom d’armée rebelle) d’emblée largement soutenus par la CIA s’étaient créés en Libye, avec pour épicentre Bengazi. Mais ils comptaient aussi certains islamistes radicaux, les chefs de certaines tribus de Libye orientale, et de transfuges du régime kadhafiste, militaires, fonctionnaires et politiciens. Quelques tribus libyennes orientales se promettaient une part plus élevée de la rente pétrolière et gazière en entrant entre rébellion contre Tripoli, qui la répartissait jusqu’alors. Mais seul un cinquième environ de la population libyenne vit en Cyrénaïque. Même en y ajoutant quelques localités plus à l’Ouest comme Misrata, la proportion n’est guère plus élevée. Cela seul suffit pour se demander où le Conseil national autoproclamé prend l’audace de prétendre représenter tout le peuple libyen et de quel droit à ce jour 30 pays du monde le reconnaissent comme gouvernement légitime.
Toutefois, seuls deux pays africains (la Gambie et le Sénégal) et trois pays arabes (le Koweït, le Qatar et la Jordanie) ont octroyé au Conseil de transition la bénédiction du droit international en lui accordant la reconnaissance diplomatique.
Washington projette depuis longtemps de remettre le Conseil national de transition ainsi que le commandement de l’armée entre les mains de sectateurs pur jus des Yankees, tels que Mahmoud Djibril, qui dès mars 2011 a tenu le rôle de Président libyen reconnu de facto au sein d’un Conseil exécutif auquel est subordonné le Conseil national de transition.
Le Conseil national de transition a pu conserver un certain temps sa fonction d’ « idiot utile » (ou à peu près) au service des USA, puis Washington a estimé et décidé qu’il avait rempli son rôle et pouvait désormais être supprimé.
Le 8 août 2011, le Conseil national de transition a été dissous en tant qu’organe de gouvernement de jure. Détail piquant, c’est Djalil, Président en exercice du Conseil national de transition et ex-Ministre de la Justice de Kadhafi qui a été chargé de le dissoudre.
On s’est ainsi débarrassé du pouvoir des tribus de Cyrénaïque ainsi que du droit de cogestion autonome de villes comme Misrata, qui peuvent désormais dire adieu à leurs espoirs d’obtenir une part plus élevée de la rente gazière et pétrolière.
En dépossédant de son pouvoir le Conseil national de transition, on s’est débarrassé non seulement des tribus libyennes orientales mais aussi de la majorité des politiciens anciennement au service de Kadhafi. Ne reste plus désormais à Bengazi que la denière des trois fractions initiales: islamistes issus des tribus, transfuges du gouvernement Kadhafi et agents de la CIA.
En bonne logique Mahmoud Djibril a été chargé de la formation d’un nouveau gouvernement. L’ordre en a été donné pour la forme par Djalil, Président en exercice du Conseil national de transition. L’avenir de ce dernier et des 31 autres membres du Conseil demeure incertain.
Le commandant en chef de l’armée rebelle libyenne, Abdel Fattah Younis avait déjà été assassiné le 28 juin 2011. Deux de ses officiers d’État-major et plusieurs de ses subordonnés ont été liquidés avec lui. De tout évidence, c’est la CIA qui a tiré les ficelles.
Le but était de se débarrasser d’un politicien et de chefs militaires qui représentaient les intérêts particuliers des tribus libyennes orientales précisément dans les principales zones pétrolifères. L’assassinat de Younis était aussi un signal en direction de tous ceux qui ne s’alignaient pas totalement sur la politique des USA et défendaient des intérêts particuliers ou avaient des vues divergentes quant à l’avenir de la Libye.
Lors de la formation du nouveau gouvernement, tous les politiciens qui n’étaient pas à 100% en accord avec les États-Unis et les officiers qui, comme Younis, défendaient déjà à l’époque de Kadhafi une collaboration avec des firmes internationales très diversifiées - préférant le Japon, l’Inde, le Brésil, la RD de Chine et la Russie et plutôt partisans, en Europe, de l’Allemagne et de l’Italie que de la France et de la Grande-Bretagne - ont été écartés. L’Italie avait déjà dans ses contrats explicitement renoncé à ses tentatives de colonisation !
Le but des USA en faisant assassiner Younis était de prendre fermement les rênes de l’armée « rebelle » pour exclure d’éventuels compromis avec les gens de Kadhafi lors de la formation d’un nouveau gouvernement à Tripoli. Au Conseil exécutif du Conseil national de transition ils avaient certes déjà placé leur homme de confiance au sein de l’armée, Omar El-Hariri - responsable des forces combattantes et de la sécurité - mais cela ne leur suffisait pas.
Younis, représentant des tribus les plus nombreuses - au premier chef les Obeidat et Warfalla avec plus d’un million de membres - était beaucoup trop indépendant à leurs yeux.
Les USA souhaitaient depuis longtemps le remplacer au commandement suprême de l’armée par Khalifa Hefter, un agent de la CIA formé par leurs soins. Cet ex-officier libyen, emprisonné au Tchad par les Français, avait ensuite émigré aux USA et y était devenu agent de la CIA. Younis et d’autres représentants naïfs des tribus orientales libyennes avaient joué les « idiots utiles » jusqu’en mars-avril 2011. Puis Younis, ancien familier de Kadhafi et ex-ministre libyen de la Justice avait été jugé peu sûr. Et de fait il n’était pas totalement aligné sur l’Occident ni sur la politique qui avait conduit les USA et l’OTAN à attaquer la Libye.
On craignait que Younis ne finisse par prendre le pouvoir en Libye, alors que les USA avaient déjà décidé, nous l’avons dit, que le futur chef d’État serait Mahmoud Djibril, un très ancien agent de la CIA, également professeur d’université aux USA et homme d’affaires. Des membres de la « Brigade de Martyrs du 17 février », troupe de sécurité du Conseil National de Transition sous commandement d’un imam local reçurent l’ordre de l’emprisonner et de l’assassiner.
L’assassinat de Younis a permis à la CIA de s’imposer au commandement de l’armée. S’ensuivit un profond remaniement au sein des cadres de l’armée rebelle, qui se proclame - ironie amère- Armée libyenne de libération de la Libye.
Le colonel Khalifa Belqasim Hiftar, ancien officier libyen subalterne autrefois emprisonné au Tchad par les Français, puis retourné par la CIA et émigré aux USA prit donc le commandement suprême de l’armée, comme le souhaitait Washington. Ainsi les Américains ont placé des hommes à eux à tous les postes les plus élevés.
Le gouvernement de Tripoli, qui doit prendre aussi le pouvoir à Tripoli, si l’État libyen ne connaît pas de scission, sera dirigé par Mahmoud Djbril Ibrahim El Warfali. C’est à Ali Tarhouni que reviendront l’économie et les finances. Aussi bien Djibril que Tarhouni ont été professeurs d’économie aux USA, tous deux sont des exilés libyens depuis longtemps membres de la CIA, tous deux sont « importés » des USA, bien que Kadhafi ait toléré que Djibril dirige quelque temps à Tripoli un bureau chargé de la privatisation. (voir : Who is really behind the Libyan Rebel movement).
Les membres actuels du Conseil National de Transition de Bengazi ne joueront plus aucun rôle dans le futur gouvernement, même si certains y sont admis. Comme nous l’avons dit, il s’agit de Moustafa Mohammed Aboud Al Djalil, Président en exercice du Conseil National de Transition, ex-Ministre de la Justice de Kadhafi, d’Ahmed Senoussi, qui représente les intérêts de l’ancienne dynastie royale ainsi que des délégués de certaines villes, par exemple Darna.
Abdoul Karim Bassami, Premier Secrétaire du Conseil National de Transition ne jouera pas non plus de rôle digne de ce nom.
Les représentants idéaux des intérêts de Washington sont des personnes ayant eu une activité scientifique aux USA ou bien une activité d’hommes d’affaires et reçu une formation de la CIA et eu des activités au sein de celle-ci; c’est précisément le cas de Djibril et d’Ali Tarhouni.
On trouve aussi des personnages tombés en disgrâce auprès de Kadhafi après un échec ou une conspiration, que la CIA a ensuite recrutés pour en faire des officiers, comme Hiftar et Omar El Hariri.
On peut désormais admettre que l’alliance entre les islamistes, quelques chefs de tribus, des transfuges du régime de Kadhafi et les hommes de la CIA va éclater.
L’opinion internationale a vu dans l’assassinat de Younis le début d’une scission dans le camp rebelle. Bengazi et d’autres localités de Libye orientales avaient déjà été le théâtre de combats entre groupes rebelles.
Bengazi et Tobrouk ont même connu de véritables soulèvements. De nouveaux mouvements de ce type, en Libye et ailleurs, pourraient bien sûr donner du fil à retordre aux USA, tout comme des rétorsions politiques, économiques, voire militaires de la part de pays gênés ou mis sur la touche par les Américains: RD de Chine, Inde, Russie. La sagesse veut que la politique états-unienne en tienne compte, car l’accès des USA à l’hégémonie mondiale est encore loin d’être assuré.
On affirme souvent que l’UE et spécialement la France et son Président Sarkozy ont joué le rôle principal dans l’attaque contre la Libye. Mais c’est une apparence trompeuse. En fait ce sont les USA qui ont été à l’initiative, même si on le dissimule encore aux yeux de l’opinion internationale. Et ce sont les USA et ses oligarques de la finance qui entendent tirer les plus gros bénéfices de cette guerre de conquête.
Brigitte Queck et Hans-Jurgens Falkenhagen
(traduit par Michèle Mialane)
Merci à Tlaxcala
Source: http://www.tlaxcala-int.org/article.asp?reference=5479
Date de parution de l'article original: 11/08/2011
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