la fiche CGT n°17 / Lacroix-Riz
Fiche CGT n° 17 / Extrême droite et médias — Campagne contre l’extrême droite Extrême droite et médias
1. http://www.lefigaro.fr/elections/presidentielles/2017/04/28/35003-20170428ARTFIG00263-entre-le-fn-et-les-medias-le-bras-de-ferpermanent.php
2. https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/03/10/l-ancien-conseiller-controverse-de-donald-trump-steve-bannon-present-aucongres-du-fn_5268820_823448.html et https://www.liberation.fr/planete/2018/04/10/cambridge-analytica-la-pieuvre-de-l-extremedroite-americaine_1642499
3. https://www.tdg.ch/monde/relation-compliquee-medias-front-national/story/26120385
4. https://blogs.mediapart.fr/antoine-bevort/blog/211016/les-trente-sites-politiques-francais-ayant-le-plus-d-audience-sur-le-web-0
Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, la posture de l’extrême droite vis-à-vis des médias consiste essentiellement à se plaindre d’être ignoré, ou encore à accuser les médias de présenter ce courant de manière négative ou fausse. Plus largement, l’extrême droite cherche à miner la crédibilité du journalisme en général, entreprise facilitée par la crise de confiance dans la démocratie issue notamment des mensonges de l’administration Bush sur les armes de destruction massive en Irak après les attentats du 11 septembre 2001. Dans les municipalités d’extrême droite, c’est la presse locale qui est visée, les journaux municipaux ou pages Facebook des mairies cherchant à se présenter comme les meilleures sources d’information. À Béziers, c’est également l’affichage municipal qui est instrumentalisé.
Méfiance de l’extrême droite envers les médias traditionnels
Ces dernières années, où il fut loin d’être absent des principaux médias, le FN n’a pas hésité à faire le tri des journalistes ou des organes de presse autorisés à couvrir les évènements qu’il organise1 . Cette défiance, qui se transforme parfois en violences, s’est retrouvée par exemple dans le mouvement des gilets jaunes fin 2018. Au congrès de mars 2018, où le parti d’extrême droite a été renommé Rassemblement national, était présent Steve Bannon. L’ancien conseiller de Donald Trump, ex-président du site Breitbart News et vice-président de Cambridge Analytica (la société qui a pu aspirer des dizaines de millions de profils Facebook et les utiliser pour la campagne du candidat Trump), désormais installé à Bruxelles, a fait siffler les médias et invité les adhérents à porter comme un badge d’honneur les qualificatifs de racistes, islamophobes ou xénophobes2 . Si on ne peut jeter l’opprobre sur l’ensemble d’une profession, exercée dans des conditions de précarité grandissante (et sans pour autant considérer que tout est parfait), le traitement médiatique de l’extrême droite n’est pas sans intérêt, dans son aspect global. Ainsi, à l’accession de Marine Le Pen à la tête du parti en 2011 s’est imposé le récit d’un « nouveau FN », malgré la permanence des fondamentaux les plus inquiétants de ce parti. Cela participe de la banalisation des idées d’extrême droite. Plusieurs journaux mènent cependant un travail d’analyse sur l’extrême droite et son principal parti3 .
L’extrême droite dispose de ses propres médias
En parallèle de ses critiques de la presse, souvent présentées comme une défense de la liberté d’expression, l’extrême droite a développé ses moyens de communication. Le FN a innové dès le début des années 1980 avec Radio Le Pen (qui délivrait des infos quotidiennes par téléphone) et en distribuant des cassettes vidéo dans les boîtes aux lettres. En 1986, le FN est le premier parti politique français à se doter du minitel (3615 Natio). Dix ans plus tard, il se dote d’un site internet (www. front-nat.fr), trois semaines avant Les Verts. En 2015, Marine Le Pen a plus de followers Twitter (545000) et de fans Facebook (650000) que Nicolas Sarkozy ou François Hollande. Au-delà du RN, c’est toute la galaxie de l’extrême droite et du néofascisme qui a su le mieux s’emparer des outils de communication numériques. Ainsi, les sites politiques les plus consultés sont Égalité et Réconciliation d’Alain Soral et Fdesouche, loin devant des sites institutionnels ou ceux de syndicats comme la CGT ou la CFDT4 .
Plusieurs exemples de publications liées à l’extrême droite
L’extrême droite a aussi, et depuis longtemps, ses propres organes de presse. Elle n’a jamais négligé les journaux papier. Parmi les publications toujours existantes, citons, sans être exhaustifs:
• Minute: cet hebdomadaire qui soutient le Front national dès la fin des années 1970 a vu ses tirages passer de 250000 exemplaires dans les années 1980 à 40000 en 2007. Patrick Buisson y a travaillé de 1981 à 1987, avant de poursuivre sa carrière à Valeurs actuelles, puis comme conseiller politique (Philippe de Villiers, Nicolas Sarkozy) et directeur de la chaîne de télé Histoire (dont il a démissionné en septembre 2018);
• Rivarol, journal se présentant dès sa création en 1951 comme « antisystème », est aussi antisémite et soutient des négationnistes. Il tirait à 5000 exemplaires dans les années 2010. Pour le banquet organisé pour les 65 ans du journal en 2016, on comptait 600 personnes dont JeanMarie Le Pen, Alexandre Gabriac, Hervé Ryssen ou le négationniste Robert Faurisson. Ce journal compte de nombreuses condamnations pour incitation à la haine raciale, contestation de crime contre l’humanité ou injure publique;
• L’incorrect: magazine fondé par des proches de Marion Maréchal, dont le premier numéro, en septembre 2017, titrait sur « ceux qui ne sont rien ». C’est un lieu de rencontre de toutes les droites et extrêmes droites… mais aussi de quelques auteurs venus d’autres champs, comme le politologue Pierre-André Taguieff, qui a écrit sur le racisme, l’antisémitisme et se dit « ni de droite ni de gauche »;
• Valeurs Actuelles, Causeur: ces journaux se situent au croisement de la droite et de l’extrême droite, ce que Ménard appelle « la droite hors les murs ».
Créée en 1987, Radio Courtoisie est devenue un passage incontournable. Cette radio associative, qui se veut la « radio libre du pays réel et de la francophonie » fait par là référence à Charles Maurras, pilier de l’Action française5 tandis que le fondateur de la radio aime citer Maurice Barrès (écrivain et homme politique de la fin du XIXe siècle, nationaliste antisémite, connue pour cette expression: « La terre et les morts »).
L’image n’est pas en reste. On compte quelques chaînes de télé en ligne, dont TVL (TVLibertés, fondée par Jean-Yves Le Gallou, ancien du Front national tout comme Philippe Milliau et Martial Bild qui animent cette télé), Independenza… Il faut également citer deux chaînes de télévision financées par le régime russe, RT (Russia Today), qui a reçu en juin 2018 un avertissement du CSA pour « manquement à l’honnêteté et à la rigueur des points de vue » et Sputnik (où travaille le journaliste Édouard Chanot, venu de Radio Courtoisie). Il y a aussi quelques reporters « indépendants » dont Vincent Lapierre, qui a commencé chez Égalité et Réconciliation avant de lancer récemment son site Le Média Pour Tous. Il ne craint pas de venir sur des manifestations de gauche mais s’est particulièrement fait connaître pour sa couerturedes gilets jaunes, où ses vidéos circulent largement6 .
5. https://www.franceculture.fr/histoire/pays-reel-quand-le-porte-parole-du-gouvernement-cite-maurras
6. https://www.lexpress.fr/actualite/medias/le-journaliste-pro-dieudonne-chouchou-des-gilets-jaunes_2054976.html
Signalons également l’association de promotion de documentaires Clap 36, de Béatrice Pignède, qui a travaillé pendant quinze ans pour la télévision (France 3, Arte) avant de se rapprocher de Soral, Dieudonné et Thierry Meyssan, auteur d’un livre complotiste sur le 11 septembre et lui aussi favorable à la liberté d’expression des négationnistes. En 2004 elle réalise un documentaire, « Propagande de guerre, propagande de paix », où interviennent notamment Annie Lacroix-Riz et Jean Bricmont. Tous deux naviguent dans des mouvances conspirationnistes et ont participé en 2005 à la conférence anti-impérialiste « Axis for Peace » organisée par Thierry Meyssan.
Des maisons d’édition au service de l’extrême droite
L’extrême droite ou les courants nationalistes, xénophobes et/ ou antisémites comptent également quelques maisons d’édition: l’Aencre (où sont édités le dessinateur Konk qui est pour la liberté d’expression des négationnistes, la dessinatrice Chard qui alterne illustrations pour livres jeunesse et dessins pour Rivarol, et qui est depuis quelques années directrice de la publication du quotidien Présent, Roland Gaucher, Jean Mabire…), Kontre Kulture, liée à Égalité et Réconciliation (qui publie Soral, Marion Sigaut, Serge Ayoub, Paul-Éric Blanrue ainsi que des rééditions de Drumont, Sorel, Maurras ou Goebbels, en plus de vendre des classiques édités ailleurs comme 1984 d’Orwell ou Balzac), Dualpha (Alain de Benoist, Jean-Pierre Blanchard…), la plus récente, la plus branchée et la moins identifiée, Ring qui mélange thrillers violents, essais autour du djihadisme, de serial killers, de la délinquance ou de l’immigration, musique (Jimmy Page, Noir Désir et bientôt une biographie de David Bowie) et bandes dessinées de Marsault, passé récemment en procès pour avoir incité au cyberharcèlement d’une jeune militante féministe.
Cet aperçu montre à quel point l’extrême droite a investi la bataille des idées sans jamais renoncer à rien de son histoire, à visage découvert ou de manière plus discrète, et ceci depuis la fin de la Seconde Guerre mondia
mise au point d'Annie Lacroix-Riz, professeur émérite d’histoire contemporaine, université Paris 7
Le Pecq, le 10 janvier 2019
J’ai été avisée, le 9 janvier 2019 d’une attaque nominale lancée contre moi par une fiche anonyme, à l’en-tête officiel de la CGT, intitulée Fiche n° 17 / Extrême droite et médias — Campagne contre l’extrême droite. Extrême droite et médias ((texte ci-joint).
À la fin d’un paragraphe intitulé « Plusieurs exemples de publications liées à l’extrême droite », je suis ainsi désignée, pour avoir été interviewée ‑‑ comme mon excellente et vaillante collègue belge Anne Morelli, qui a lutté contre les guerres impérialistes contre la Yougoslavie et l’Irak et s’est rendue sur place en pleins bombardements ‑‑ par « Béatrice Pignède, qui a travaillé pendant quinze ans pour la télévision (France 3, Arte) avant de se rapprocher de Soral, Dieudonné et Thierry Meyssan, auteur d’un livre complotiste sur le 11 septembre et lui aussi favorable à la liberté d’expression des négationnistes. En 2004 elle réalise un documentaire, “Propagande de guerre, propagande de paix”, où interviennent notamment Annie Lacroix-Riz et Jean Bricmont. Tous deux naviguent dans des mouvances conspirationnistes et ont participé en 2005 à la conférence anti-impérialiste “Axis for Peace » organisée par Thierry Meyssan. »
Notons que même Wikipédia (voir ci-dessous) rend compte de façon factuelle de ce documentaire de 2004 de Béatrice Pignède, décédée en 2015, dans les termes suivants : « Son documentaire Propagande de guerre, propagande de paix en 2004 fait intervenir notamment deux historiennes Anne Morelli et Annie Lacroix-Riz, comparant les thèmes de propagande lors de la guerre en Irak avec ceux développées lors d'autres conflits. » https://fr.wikipedia.org/wiki/B%C3%A9atrice_Pign%C3%A8de ) Naturellement, je n’ai rien à retrancher de ce que j’ai déclaré dans cette interview, et je ne suis responsable à aucun titre de l’évolution politique de cette journaliste, qui avait été exclue de la télévision pour esprit critique, que je ne connaissais que comme telle, et que je n’ai pas revue depuis 2005.
Le document accusateur de la CGT semble avoir été établi à l’usage de la formation de ses cadres, supposés conduire, grâce aux préceptes ainsi dispensés, une efficace lutte idéologique « contre l’extrême droite ».
Je serais donc « rouge brune », ainsi qu’il ressort de mon compagnonnage de septembre 2018 avec nombre d’amis et camarades qui sont l’honneur du mouvement ouvrier et des intellectuels progressistes? https://www.youtube.com/watch?v=CRvwFM8A1-4
L’amalgame
Le texte de la CGT est inspiré par le même esprit de terrorisme intellectuel que celui du Decodex du Monde, des Check News (en anglais, naturellement, langue maternelle des intéressés) de Libération et de leurs surgeons multiples de divers organes de « grande presse ». Il fleure également bon,
‑‑ d’une part, la détestable fiche Wikipédia, cas fréquent, la mienne comprise (voir lien ci-dessus), rédigée par des scripteurs d’extrême droite. Ceux-ci ont définitivement interdit de séjour tout « discutant » de bonne foi qui osait contester ma mutation en fascisto- négationniste (les amateurs de « discussion » sur ce site peuvent essayer de contester le contenu de ma fiche, ils en comprendront d’emblée les méthodes), et,
‑‑ d’autre part, la littérature de la mouvance prétendument « antifasciste ». Mouvance extrêmement hétéroclite, puisque s’y retrouvent des conservateurs ou réactionnaires de la « Nouvelle » ou de l’« Ancienne » droite, tel Pierre-André Taguieff, aux côtés de membres du parti socialiste ou directement utilisés par ses organisations, tel Rudy Reichstadt, « lancé » par le ministère de l’éducation nationale sous la présidence Hollande, et qui a déjà mené contre moi une campagne ignominieuse me taxant de « conspirationniste », au motif que j’aurais inventé une « synarchie » qui n’existe pas, comme l’écrit mon collègue Olivier Dard, professeur à Paris 4, et conférencier favori de l’Action française (voir le document ci-joint « Lettre ouverte à mes amis de l’UJRE sur une curieuse invitation, samedi 10 mars 2018 »).
Je signale pour mémoire que la « fiche n°17 » fustige Maurras, « Maître » dont Olivier Dard vante les mérites en tout lieu, manifestement sans choquer l’historiographie dominante issue de l’Institut d’études politiques, qui a cautionné sa fiche de commémoration du centenaire de Maurras et a été fort fâchée de la renonciation à la publication, devant l’ampleur du scandale. Mes camarades du PRCF savent d’ailleurs que cet universitaire avait été invité (mais pas moi) il y a quelques mois à Montreuil, municipalité dirigée par le PCF, à un « débat » sur l’extrême droite, à laquelle il appartient : c’est un Montreuillois qui m’en a informée, information qui nous a permis de réagir à cette invitation unilatérale.
L’épisode de la tentative de commémoration de Maurras est conté ici : « Apparences et réalités de la commémoration de Charles Maurras », paru les 15-17 mai 2018 sur le site Lescrises.fr,https://www.les-crises.fr/de-charles-maurras-a-son-biographe-olivier-dard/
https://www.les-crises.fr/apparences-et-realites-de-la-commemoration-de-charles-maurras-2e-partie-une-commemoration-celebration-par-un-biographe-faisant-lunanimite-des-historiens-du-consensus/
https://www.les-crises.fr/de-lurgence-de-la-reedition-des-collabos-au-role-du-haut-comite-aux-commemorations-nationales-de-2011-a-2018/
La littérature qui me qualifie de « rouge brune », à l’exemple de la « fiche n° 17 » de la CGT, est toujours caractérisée par l’amalgame entre, d’une part, la droite et l’extrême droite, et, d’autre part, la vraie « gauche », c’est-à-dire celle qui se bat pour la suppression du capitalisme, but officiel initial, à ma connaissance, de la CGT, longtemps maintenu. La fraction « européiste » de la Confédération ne supporte plus la gauche qui récuse l’orientation de la Confédération européenne des syndicats, à laquelle elle appartient depuis l’ère Thibault. Elle juge aussi intolérable la mise en cause de l’orientation « occidentale », adhésion à l’OTAN incluse, qui viole pareillement toutes les traditions de lutte et d’analyse de la CGT-CGTU.
Il s’agit du même amalgame que celui qui a eu cours dans l’entre-deux-guerres, et qui a conduit ses initiateurs à la collaboration (de classe puis tout court), alors que ses victimes ont compté parmi les héros, français et étrangers, de la Résistance : je renvoie pour cette comparaison à mon ouvrage De Munich à Vichy, l’assassinat de la 3e République, 1938-1940, Paris, Armand Colin, 2008, 408 p., et à la contribution « La défaite de 1940 : l’interprétation de Marc Bloch et ses suites », au colloque Marc Bloch, Rouen, 8-10 février 2012 ». Cette dernière figure dans le récent ouvrage de 2015, Scissions syndicales, réformisme et impérialismes dominants, 1939-1949, Montreuil, Le Temps des cerises, 2015, 250 p., épuisé, mais qui sera réédité chez Delga. Ces travaux montrent, pièces d’archives à l’appui, l’opposition entre syndicalisme de lutte et syndicalisme de collaboration de classe, opposition particulièrement nette à la fin des années 1930 préludant à la guerre générale.
La russophobie
Notons avec intérêt que la CGT, dans ses documents de « formation » des cadres, désigne à la vindicte les ennemis russes de la France ‑‑ ce qui nous ramène au temps où René Belin, second de Jouhaux et promis à sa succession, et futur « ministre du Travail et de la Production industrielle » dissolvant la CGT par décret, le 10 novembre 1940, hurlait « Sus aux Russes » et « À bas les Sénégalais de Staline » avec les siens. Ceux-ci le suivirent sous l’Occupation et bénéficièrent d’énormes prébendes étatiques et patronales après l’abrogation de la CGT (voir mes ouvrages Industriels et banquiers français sous l’Occupation, Paris, Armand Colin, 2013, 816 p., et Les élites françaises, 1940-1944. De la collaboration avec l’Allemagne à l’alliance américaine, Paris, Dunod-Armand Colin, 2016, 496 p., index Belin).
La Russie de Poutine offrirait l’exemple-type de la distribution d’argent étranger irriguant une information malhonnête et tronquée. La CGT n’a, à ma connaissance, jamais protesté contre ce qui caractérise l’information d’aujourd’hui, c’est-à-dire la gigantesque influence, financière et idéologique, dont disposent les États-Unis et toutes les institutions qu’ils contrôlent pour corrompre l’information en général et nos « élites » journalistiques en particulier. Il est parmi elle nombre de spécimens des French-American Young Leaders, qui ont remplacé la grossière propagande de Guerre froide d’après-guerre du Reader’s Digest par une intoxication « française » à flots continus. Ne manquez pas, je vous prie, d’en consulter la liste instructive,https://frenchamerican.org/young-leaders/earlier-classes/
Alors, par exemple, je suis également nazie parce que j’ai été accueillie plusieurs fois sur le site Les.crises, dont le responsable, Olivier Berruyer, est harcelé par les chouchous des médias – telle Cécile Vaissié, dont l’ahurissant ouvrage Les réseaux de Poutine en France (2016), a bénéficié d’un écho énorme, de la gauche « Médiapart » à l’extrême droite ‑‑ et qui est accusé par ces mêmes médias de répandre des « fausses nouvelles » (Fake News, c’est mieux) et de se soumettre aux diktats d’un Poutine prêt à fondre sur la France?
Alors, par exemple, je suis également nazie parce que, jamais invitée sur le service public de télévision quand Frédéric Taddeï y animait une émission, j’ai été invitée par lui à participer à une émission de « débat » (d’indéniable débat) sur l’extrême droite, sur RT, le 17 octobre 2017 :https://francais.rt.com/magazines/interdit-d-interdire/54680-interdit-dinterdire-montee-nationalismes-droites-extremes-retour-annees-30; https://www.youtube.com/watch?v=Csu-lbTum8k . J’y ai figuré aux côtés de Thomas Guénolé, aujourd’hui traité par LREM en délinquant, https://francais.rt.com/france/57708-il-y-a-pire-que-ceux-qui-tabassent-aurore-berge-saisit-justice-contre-cadres-insoumis ? Après la saisie gouvernementale de tous fichiers et adresses de LFI, démarche exorbitante des droits et libertés des citoyens qu’on avait peu vue mise en œuvre depuis la répression anticommuniste 1° de 1939-1940, sous la pression explicite de Berlin (voir De Munich à Vichy) et 2° des années 1950, sous la pression explicite de Washington, on passe à la case prison pour subversion? Avec les approbations et encouragements de la CGT contre ces « rouges-bruns »? J’assure ce politiste de toute ma solidarité.
Je profite aussi de l’occasion pour rendre hommage au grand politiste-historien progressiste américain, William Blum, ancien du Département d’État et honnête homme, qui a, à partir de 1967, mis sa vie (en ruinant sa carrière) au service de la vérité sur l’impérialisme américain, et qui vient de mourir. Je recommande vivement à mes correspondants la lecture des Guerres scélérates, Lyon, Parangon, 2004 (Killing Hope: U.S. Military and CIA interventions since World War II, Monroe, Maine, Common Courage Press, 2003, édition complétée de son ouvrage essentiel, The CIA: A Forgotten History, Londres et New Jersey, Zed Books, 1986). Ils connaîtront ainsi mieux le principal corrupteur de la planète de l’après-Deuxième Guerre mondiale. Rouge-brun, aussi, feu William Blum?
Mon éditeur, ami et camarade Aymeric Monville serait aussi un « rouge-brun » pour avoir sur RT Royaume-Uni exposé clairement et honnêtement depuis octobre 2018 la transformation du présent régime en dictature de droite, puis les développements du mouvement social en cours? Qu’il soit également assuré de mon soutien :
https://www.initiative-communiste.fr/articles/prcf/giletsjaunes-notre-camarade-aymeric-monville-explique-la-situation-sur-russia-today-international/
https://www.initiative-communiste.fr/articles/luttes/video-prcf-russia-today-francais-attaches-aux-refus-de-lamericanisation-aymeric-monville/
https://www.initiative-communiste.fr/articles/culture-debats/le-bilan-de-lannee-macronique-par-a-monville-et-rt-video/
Historienne marxiste et communiste
Je rappelle à mes lecteurs et correspondants que je compte parmi les rarissimes historiens marxistes de France, et, horresco referens, communistes en sus. Nul n’a jamais pu trouver dans un mes écrits ou une mes interventions la moindre complaisance pour le fascisme et le racisme. Je me permets à cet égard de renvoyer à la liste de mes travaux, qu’ils trouveront surhttp://www.historiographie.info/cv.html et sur le texte ci-joint (CV de mes travaux).
Y figure notamment mon ouvrage en relecture, consacré à La non-épuration, particulièrement éclairant, je crois, sur l’appareil d’État, notamment policier et judiciaire, qui, après la Libération, a été chargé de rétablir un total statu quo, de gommer la Collaboration des plus grands coupables, et de bafouer, à un degré qu’il est difficile d’imaginer, les anciens résistants, morts ou survivants. Lesquels avaient été en majorité des militants, français et étrangers, du PCF et de la CGTU, puis de la CGT réunifiée, puis de la CGT clandestine de Frachon et Costes. Cet ouvrage sera dédié aux FTP-MOI (et je pense particulièrement à mon cher ami et camarade Léon Landini, lutteur infatigable) et au grand magistrat Paul Didier, honneur unique d’une « Magistrature déshonorée », pour reprendre le titre d’un ouvrage de Virginie Sansico (La justice déshonorée 1940-1944, Paris, Tallandier, 2015).
J’ai par ailleurs, par mes travaux sur la CGT dans l’après-guerre, objet d’une thèse d’État, seule thèse d’État consacrée à ce sujet, et par de nombreux autres travaux, relatifs aux années 1930-1950, montré mon attachement au mouvement syndical et mon admiration pour la CGT combative des Frachon, des Costes et des Croizat : « CGT et revendications ouvrières face à l’État, de la Libération aux débuts du Plan Marshall (septembre 1944-décembre 1947). Deux stratégies de la Reconstruction », 4 vol. (2 de texte: 1215 p., 2 de notes: 978 p. + table des matières, index et errata), thèse d’État soutenue à l’Université de Paris I, le 7 novembre 1981. Jury: J. Bouvier, J.-M. Mayeur, A. Prost, R. Trempé, C. Willard. Cette thèse a été publiée en deux ouvrages: La CGT de la Libération à la scission (1944-1947), Paris, Éditions Sociales, 1983, 400 p., et Le choix de Marianne: les relations franco-américaines de 1944 à 1948, Paris, Éditions Sociales, 1986, 222 p., qui va faire l’objet, en 2019, d’une réédition chez Delga. Sans oublier, et il est d’autres contributions, Scissions syndicales déjà mentionné, et Aux origines du carcan européen, 1900-1960. La France sous influence allemande et américaine, Paris, Delga-Le temps des cerises, réédition augmentée, 2016, 165 p., où j’évoque les prestations comparées, dans les années 1950, du syndicalisme de connivence, sous stricte tutelle patronale, étatique et américaine, et de la CGT de Frachon alors résolument anti-« européiste ».
La direction de la CGT s’est, à cette date, sa position sur le mouvement social en cours le démontre avec éclat, ralliée à une conception du syndicalisme que ses refondateurs de la Libération, les lutteurs de la CGTU, ont combattue pendant leurs longues décennies d’honneur (pas d’honneurs) : elle a abdiqué ses traditions, et classerait aujourd’hui ses anciens chefs, héros de la Résistance intérieure, parmi les communistes qu’elle ose qualifier de « rouges-bruns ». Léon Landini aussi?
Il ne s’agit évidemment pas la première attaque contre moi : mes correspondants et les habitués de mon site ont été informés de nombreux autres assauts, et ont eu à plusieurs reprises, je les en remercie à nouveau, l’occasion de me soutenir contre d’autres assaillants, de fausse gauche, de droite et d’extrême droite (« Ukrainiens » cléricaux compris).
Je ne cache pas cependant ma sidération et mon indignation de ce que la direction de la CGT, Confédération au service de laquelle j’ai encore récemment, contre les insupportables prétentions des héritiers de Louis Renault (2011-2014), mis mon travail d’historienne, ait eu l’audace de me classer à l’extrême droite. Témoignent de ce travail au service de la science historique et du mouvement ouvrier les articleshttp://www.historiographie.info/renaultcharst.pdf ethttp://www.historiographie.info/mediapart0711.pdf (sans oublier Industriels et banquiers français sous l’Occupation, Paris, Armand Colin, 2013, 816 p., où Renault occupe une place notable, et les luttes ouvrières un chapitre entier, le 10).
La CGT, dont j’ai été membre précoce de l’Institut d’histoire sociale, m’en a chassée sans tambours ni trompettes, à la fin des années 1990, dans la discrétion nécessaire à l’arrivée, prévue en vue d’adhésion imminente à la Confédération européenne des syndicats, de Bernard Thibault : non pas parce qu’elle me trouvait « brune », mais parce qu’elle me trouvait beaucoup trop « rouge ». Sollicitant avec succès d’autres historiens plus conformes à ses nouvelles conceptions de l’histoire socio-économique (et qui apprécient légitimement de se voir reconnus et honorés par les représentants les plus éminents de la classe ouvrière et des salariés de France), elle m’a systématiquement effacée, dans des conditions qui seraient comiques si elles n’étaient honteuses, de ses bibliographies et de ses colloques : notamment, en 2013, d’un colloque sur Croizat, pour lequel elle a invité des historiens dont aucun n’avait jamais travaillé sur Croizat, un des personnages importants de ma thèse sur la CGT, scandale étendu à Michel Étiévent, auquel j’ai réagi, en vain (texte joint sur la réplique piteuse de l’IHS à propos de ce seul dernier, sans réponse à ma propre protestation).
La CGT est désormais passée, avec ce document censé « former » ses militants responsables, à la charge ouverte, absolument inqualifiable. J’ai naturellement l’intention d’interroger Philippe Martinez, ancien militant et responsable CGT de Renault, sur les raisons de cet affront anonyme, et de mettre au défi la direction de la Confédération de trouver une déclaration ou un écrit de ma part qui ait pu donner lieu à cette accusation infamante. Je remercie par avance tous mes correspondants de diffuser au maximum cette adresse de protestation. J’ai besoin de leur soutien contre une initiative qui s’inscrit dans une entreprise de destruction et de criminalisation de la gauche, la vraie, et de l’histoire scientifique et indépendante des financements des puissants, français ou étrangers.
Cette dernière sera assurément sévère sur le changement de camp (que nous savons tous momentané, si durable qu’il ait été) de la vieille Confédération.
Amitiés et remerciements anticipés à tous,
Annie Lacroix-Riz, historienne et syndicaliste (Snes, 1967-1985, Snesup, 1985 jusqu’à cette date).
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