le coût de la guerre en irak
Au moment où la guerre en Irak entre dans sa cinquième année, les Etats-Unis font leurs comptes : l’intervention a déjà avalé près de 500 milliards de dollars (378 mds d’euros) et le montant total pourrait atteindre voire dépasser les 1.000 milliards (60 mds d’euros). Ni la Corée ni le Vietnam n’avaient coûté autant mais c’est surtout le mode de financement qui inquiète les économistes.
Certes, la facture s’avère bien plus élevée que ne l’avait prévu l’administration de George W. Bush avant l’invasion lancée le 20 mars 2003, mais cela ne représente pas 1% du produit intérieur brut (PIB) américain, contre 9% et 14% respectivement pour la Corée (1950-53) et le Vietnam (1964-75).
Seulement, la guerre en Irak, comme en Afghanistan, est financée par des enveloppes s’ajoutant au budget fédéral -un mode de paiement moins contrôlé par le Congrès et habituellement réservé aux situations exceptionnelles, comme l’ouragan Katrina. Ce système avait été abandonné après un an de conflit en Corée, et dès 1966 pour le Vietnam.
Soucieux de rétablir un fonctionnement normal, les responsables républicains et démocrates des questions budgétaires au Parlement ont demandé en décembre à Bush de réintégrer les dépenses irakiennes au budget fédéral régulier. L’administration s’est exécutée pour 2008, non sans avoir d’abord demandé une rallonge de 100 milliards de dollars (75,6 mds d’euros) pour 2007.
Autre différence avec le passé : Washington n’exige pas de lourds sacrifices aux Américains pour financer l’effort de guerre, souligne Robert Hormats, haut responsable de la banque d’affaires Goldman Sachs et auteur d’un livre à paraître, intitulé "The Price of Liberty : Paying for America’s Wars" ("Le Prix de la liberté : le coût des guerres de l’Amérique"). "Pour cette guerre, il n’y a eu ni réévaluation, ni modification de la politique fiscale", constate-t-il.
Au lieu de cela, la dette explose. A la fin de l’année, l’Irak aura coûté aux Etats-Unis davantage que la Seconde Guerre mondiale, la plus chère à ce jour (2.000 mds dollars en dollars constants/1.500 mds d’euros). Le ministre de la Défense Robert Gates tente cependant de relativiser, soulignant que le budget de guerre total pour 2008 ne représente que 4% du PIB national.
Pour l’ancien sénateur démocrate du Nebraska Bob Kerrey, cela montre surtout la force de l’économie américaine aujourd’hui. "Nous avons démontré une fantastique capacité à mener un programme très, très onéreux", note-t-il, mais comment financera-t-on le programme social pour les personnes âgées, dont le poids va exploser dans les prochaines années, ainsi que d’éventuelles futures crises de sécurité nationale ?
En outre, les dépenses ne cesseront pas avec le départ des troupes d’Irak, souligne Linda Bilmes, de la Kennedy School of Government à l’Université d’Harvard. Elle estime le coût total des programmes d’assistance aux anciens combattants d’Irak et d’Afghanistan à 350 milliards de dollars (265 mds d’euros) pour les premiers et 700 milliards de dollars (529 mds d’euros) pour les seconds, sachant que les chances de survie des soldats blessés sont meilleures qu’auparavant. "C’est un autre aspect du conflit que le Pentagone et le gouvernement n’ont ni préparé, ni prévu au budget."
Et Linda Blimes d’évaluer, avec le prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz, le coût réel de la guerre en Irak à plus de 2.000 milliards de dollars (1.500 mds d’euros), en tenant compte des dépenses passées et futures mais aussi de l’impact économique, sur le prix du pétrole par exemple.
Mais quel aurait été le prix de l’inaction ?, s’interroge Steven Davis, enseignant en commerce à l’université de Chicago. Avec deux de ses collègues, il a évalué à environ 14,5 milliards de dollars (11 mds d’euros) par an ce qu’il en aurait coûté de maintenir le dispositif de survols des zones d’exclusion et d’inspections du désarmement en place pendant dix ans, soit le dixième de la guerre d’Irak.
Un montant à mettre en regard d’autres hypothèses : et si Saddam Hussein avait provoqué des interventions militaires des Etats-Unis ? Et si Washington avaient de toute façon dû le renverser ? Et s’il avait favorisé des actions terroristes contre les intérêts américains ? Avec ces "si", l’équipe universitaire estime qu’il aurait pu en coûter de 50 à 700 milliards de dollars (37,8 à 529,3 mds d’euros).
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