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charles baudelaire, les bijoux

 Les bijoux

 • pour visionner la vidéo "sur les traces de baudelaire" d'eleonore golderg, cliquez ici  



La très-chère était nue, et, connaissant mon coeur,
Elle n'avait gardé
que ses bijoux sonores,

Dont le riche attirail lui donnait l'air vainqueur
Qu'ont dans leurs jours heureux les esclaves des Mores
.

Q
uand il jette en dansant son bruit vif et moqueur,
Ce monde rayonnant de métal et de pierre
Me ravit en extase,
et j'aime à la fureur
Les choses où le son se mêle à la lumière.


E
lle était donc couchée et se laissait aimer,
Et du haut du divan elle souriait d'aise
A mon amour profond et doux comme la mer,
Qui vers elle montait comme
vers sa falaise.

L
es yeux fixés sur moi, comme un tigre dompté,
D'un air vague et rêveur elle essayait des poses,
Et la candeur unie à la lubricité
Donnait un charme neuf à ses métamorphoses ;

E
t son bras et sa jambe, et sa cuisse et ses reins,
Polis comme de l'huile, onduleux comme un cygne,
Passaient devant mes yeux
clairvoyants et sereins ;
Et son ventre et ses seins, ces grappes de ma vigne,

S
'avançaient, plus câlins que les Anges du mal,
Pour troubler le repos où mon âme était mise
,
Et pour la déranger du rocher de cristal
Où, calme et solitaire, elle s'était assise.

J
e croyais voir unis par un nouveau dessin
Les hanches de l'Antiope au buste d'un imberbe,

Tant sa taille faisait ressortir son bassin.
Sur ce teint fauve et brun, le fard était superbe !

E
t la lampe s'étant résignée à mourir,
Comme le foyer seul illuminait la chambre,
Chaque fois qu'il poussait
un flamboyant soupir,
Il inondait de sang cette peau couleur d'ambre !

Charles Baudelaire

 

 

de Les Fleurs du Mal



18/12/2006
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