la signification politique de la nomination Lieberman
Le choix renouvellé de l'épuration éthnique
Nous avions toujours affirmé que le danger qui menace le système politique en Israël, que les fondateurs ont voulu démocratique, gît à la droite et non à la gauche de la classe politique. Il s'agit d'une droite politique, idéologique et
pratique, enracinée et dispersée dans tous les partis sionistes. Nous considérons, pour notre part, que la gauche sioniste est en majorité de droite, selon les critères européens! Tout observateur de l'évolution de la pensée
politique en Israël peut facilement découvrir une réalité, celle que les forces de la gauche sioniste traditionnelle, et leurs partis, n'ont pu s'arracher au temps, n'ayant pu s'éloigner de leur implication à l'origine, au niveau de leur pensée et de leurs pratiques, aux idées d'épuration ethnique, d'expulsion et d'isolement spatial. Les Juifs qui ont naïvement cru qu'il était possible de vivre en Palestine en commun avec son peuple d'origine, ont été écartés de différentes manières.
Quant à ceux qui ont voulu que la présence juive en Palestine soit une entité culturelle et non politique, ont été entièrement supprimés. Disons que la dominante fut pour ce courant sioniste conflictuel qui a considéré que sa présence dans cet espace est une négation de son peuple originel, qu'il ne peut se réaliser qu'en supprimant les Palestiniens, avec tout ce que comporte cette expression. Quant au parti travailliste sous la direction de Ben Gourion, qui s'est déclaré et s'est présenté comme étant la voix de la modération ou du choix pragmatique, il fut en fait le moteur du projet sioniste consistant à installer un Etat national juif dans l'espace palestinien, avec le prix du nettoyage de cet espace de sa population d'origine. Par cette introduction, nous voulons
analyser la politique israélienne aujourd'hui, qui porte dans ses profondeurs des indications plus lointaines que le terme politique peut décrire. La question n'est pas dans la nomination de Lieberman qui dévoile les rêves collectifs de la
société juive concernant la géopolitique, et en même temps la crise de la société juive en Palestine et son enfermement dans le ghetto qu'elle s'est érigée. Il s'agit d'une crise qui se manifeste dans la destruction de la théorie de "l'imminence technologique" ou du "fondamentalisme scientifique", comme
certains l'ont appelée, basée sur la supériorité technologique israélienne supposée et absolue qui devrait garantir la victoire permanente d'Israël, en tant qu'Etat et en tant que société, contre tout adversaire, et lui permettre de vaincre tout défi! A partir de cette supposition, la société juive a développé, par le biais de ses forces "libérales", une démocratie basée sur le chauvinisme juif, dont les constantes demeurent presque inchangées. Cette démocratie et ce libéralisme sont demeurés prisonniers, incapables d'estimer et de rendre compte.
Ils ne reconnaissent pas l'injustice historique envers les Palestiniens qui a été exilé, qui est resté ou qui a été soumis à l'occupation, ni envers les juifs orientaux qui ont été apportés de l'espace arabe pour les rendre ashkenazes
(occidentalisés) car ils démentent la théorie que le juif sioniste est une négation de l'Orient et de tout ce qui y vit. Ce qui signifie que cette société qui considère le conflit comme ayant commencé en 1967 n'a pas pu se réconcilier
avec elle-même pour ce qu'elle a commis et demeure incapable de dire son histoire violente et catastrophique qu'en se posant en victime. Elle n'a pu s'approcher, que pour une période très courte et avec timidité, de l'honnêteté
avec elle-même, que lorsque des historiens post-sionistes et post-coloniaux, se sont exprimés dans le climat instauré par les accords d'Oslo (Benny Morris et d'autres). Mais très vite, une partie d'entre eux a reculé, revenant à son parcours originel.
Dans ce cadre, la société juive peut recommencer ses succès et ses erreurs. La nomination de Lieberman n'indique pas la nature des changements politiques en Israël, mais une réalité plus profonde, celle affirmant que l'épuration ethnique
était et est encore une possibilité et une alternative pour cette société !
Comme si les élites israéliennes dont la théorie relative à "l'imminence technologique" a subi un échec cuisant dans la résolution du conflit avec les Arabes et les Palestiniens et à garantir leur présence en Palestine, se sont repliées sur le point de départ, lorsque la solution était de jouer avec la
démographie en s'y appuyant, et nous avons assisté à la Nakba et ses effets, jusqu'à nos jours. Ce qui veut dire que ces élites considèrent que cette alternative est l'ultime succès et la réalisation de ses buts, et qu'il est possible d'y revenir.
Nous devons voir, ici, le lien entre la nomination de Lieberman et la dernière guerre contre le Liban, guerre au cours de laquelle Israël a, une fois encore, eu recours à une capacité de destruction infernale, qui ne correspond absolument pas à ce qui se passe aux frontières avec le Liban. Ce qui signifie que la société israélienne peut, à tout instant, produire le terrible et le catastrophique, au niveau des actes et des politiques. Ceci n'est pas étonnant,
même si nous aimons nous étonner de temps à autre, sachant que l'histoire du conflit n'a laissé aucun scénario que nous n'ayions vécu ni vu, et dans ses formes les plus multiples... Ce qui n'est pas réglé par la force sera réglé par
encore plus de force ! Et je ne vois dans "la philosophie" de Lieberman, qui n'abnmodifié aucun mot par rapport à ses prédécesseurs, que la manifestation de cette idée promettant de crimes israéliens futurs. Lieberman n'est pas l'homme qui
suscite notre inquiétude, mais c'est ce qu'il personnifie, le choix de la violence fait par les nouvelles élites juives israéliennes que nous voyons imiter les élites fondatrices, qui ont profité du climat de la deuxième guerre mondiale pour se jeter, sans aucune pitié, sur la Palestine et son peuple,
prenant prétexte de la justesse de la cause juive et la souffrance du fait des massacres commis par le nazisme. Ce qui est inquiétant, c'est cette légitimité renouvelée des solutions violentes qui sortent du goulot de la bouteille où
Israël s'est placé après sa première guerre contre le Liban.
La soumission des Palestiniens est le seul choix stratégique aujourd'hui pour la société juive en Palestine, depuis qu'elle a refusé de reconnaître la production de la question palestinienne. Ce choix a échoué, ni les Palestiniens se sont
soumis, ni ils ont disparu de l'espace. L'incapacité à réaliser ce choix a donné naissance à une congestion puissante et à un désir d'asséner aux Palestiniens une autre leçon, en donnant un coup mortel ou ce qui lui ressemble, surtout que
la capacité de frappe israélienne a été ébranlée depuis l'échec au Liban en 1983, la première puis la seconde Intifada. Cette congestion pousse et mobilise l'ensemble des énergies de cette société dans une tentative, qui devra
inévitablement parvenir, pour trancher. A partir de là, et que nous excusent les analystes et les commentateurs qui occupent les chaînes satellitaires et les radios si nous ne partageons pas leur avis, il ne s'agit pas pour Olmert, chef
du gouvernement israélien, de défendre son poste ou son alliance fragile gouvernementale. La participation de Lieberman dans l'espace politique est semblable à la mise en place d'un mur d'apartheid dans l'espace géographique.
Dans les deux cas, il s'agit d'indiquer une mentalité politique et une réflexion concernant le Palestinien et son espace. Les deux mêlent la force et la peur, la crise ou le problème.
Il y a une force militaire et politique soutenue sur le plan international et une peur juive de perdre le pari contre l'histoire et l'espace, et un problème matérialisé par le Palestinien. Le mur est venu pour isoler le lieu et alléger
le poids de la démographie, comme le désengagement unilatéral de Gaza. C'est la même politique qui est appliquée dans l'espace politique, en faisant appel à Lieberman comme il fut fait appel au mur à l'époque. Rappelons que l'idée du mur, tel qu'il est matérialisé sur le terrain, est d'abord une idée issue de la philosophie de la gauche israélienne, et ensuite, de sa politique. Dès le début,
l'idée préférée par les forces influentes du mouvement sioniste est la séparation entre les juifs et les Palestiniens dans l'espace. Ils ont poussé ce choix jusqu'à l'épuration ethnique. L'idée est reprise actuellement avec le mur
et en accordant la légitimité totale, avec le poste de ministre des affaires stratégiques, à une personnalité qui représente le choix renouvelé de l'épuration éthnique !
Ce qui se passe actuellement en Israël, c'est le retour au point de départ, et le renouvellement du choix de l'épuration ethnique que les élites israéliennes brandissent pour que nous apprenions la leçon ! Il n'y a aucun doute que cette
voix, même si elle est portée par Lieberman et son parti, représente une voix collective juive qui s'exprime de temps à autre, des tribunes les plus importantes et par de grands responsables de l'Etat. Que se déroule donc ce qui
s'est déjà passé, et l'injustice qui a suivi ! S'ils mentionnent Lieberman, c'est pour que nous demandions la protection, nous récitions les prières et regrettions les jours du Likoud et de Sharon, des travaillistes et de Peretz et les autres participants à la tragi-comédie ! Ils le mentionnent pour que nous l'entendons afin que nous les supplions de ne pas le faire participer au gouvernement ! Tout à fait comme depuis des dizaines d'années, lorsqu'ils ont mis l'occupation en discussion, l'ayant considérée comme le début, afin que
nous oublions la Nakba, l'exil forcé, l'épuration ethnique ou que nous considérions que le début du conflit date de 1967 !
La nomination de Lieberman au gouvernement en Israël, en réalité, ne purifie aucun des politiciens israéliens, ni de "gauche" ni de "droite", ni ne peut les transformer en héros de la paix, de la modération ou de la démocratie. Car la
question n'est pas dans le vocabulaire, ni dans les personnages, mais dans la philosophie politique produite par les élites juives en Palestine, dès leur installation dans le lieu, et même avant. Lieberman a une autre signification,
qui prend sa racine dans la philosophie raciste victorieuse militairement, armée de la théorie de la supériorité technologique et du fondamentalisme scientifique, et qui produit quotidiennement mille phénomènes semblables.
C'est ce qui est inquiétant, surtout lorsque la peur et la force, rejoignent cette philosophie, annonçant des catastrophes terribles, qui ne seront pas limitées à l'expérience juive, mais à toute la planète.
Au commencement, ce fut l'épuration ethnique, et ils peuvent appel à elle sous prétexte de guerre préventive ou d'autres justifications. Ils peuvent trouver dans la peur collective juive des charges suffisantes pour détruire l'humanité et les pierres !
Marzûq al-Halabi
5 novembre 2006
Traduit par Centre d'Information sur la Résistance en Palestine
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