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Légalité et légitimité de la résistance (II)

Légalité et légitimité de la résistance



2 – Ils piétinent leur légalité :

Il semble bien que les amis arabes des Etats-Unis soient décidé à piétiner leur
propre légalité. C’est semble-t-il, la nouvelle orientation américaine face à
l’avancée des puissants courants de la résistance, qui ont réussi à porter des
coups très importants aux forces coloniales, surtout au Liban, au cours de l’été
2006.

Après la phase « démocratique » américaine qui a en fait permis aux voix de
l’opposition de s’exprimer plus franchement dans des Etats comme la Jordanie ou
l’Egypte, et qui a montré la faiblesse structurelle de l’opposition souhaitée
par les Etats-Unis, la nouvelle phase est en place : retour à la répression et
aux décrets illégaux, comme en Jordanie où sévit une grave répression contre
l’opposition nationale et en Egypte où le pouvoir profite de sa mainmise sur le
parlement pour prendre des mesures antidémocratiques et renforcer le pouvoir du
président. En Jordanie, les lois sur les publications et la presse tuent
l’expression libre, ce qui n’a pas l’air de gêner outre mesure Reporters Sans
Frontières. C’est ce climat de terreur que souhaitent les Etats-Unis dans ces
pays sensibles et limitrophes de la Palestine, après la victoire du Hamas aux
élections, le développement de la résistance nationale en Palestine et la
victoire de la résistance nationale libanaise, notamment du Hizbullah, en août
2006.

L’ouverture vers l’opposition prônée démagogiquement par les Etats-Unis n’a pas
profité à leurs proches amis, malgré tous les dollars déversés pour les élever
au rang de partenaires valables. C’est ce qui explique le retournement des Etats
locaux contre les libertés publiques qu’ils avaient timidement osé et que se
sont tues les voix des intellectuels ayant réclamé ces libertés. Ils préfèrent
actuellement parler de géostratégie, expliquant clairement que leur alignement
sur la politique américaine vise en fait à faire face à l’alignement des forces
« obscures » (les forces de la résistance) sur l’Iran et la Syrie. En quelques
phrases, ils ont muselé leurs prétentions antérieures, se sont débarrassés de
toutes les fioritures qui empêchaient une réelle compréhension de leurs discours
pour affirmer sans détours qu’ils sont des alliés des Etats-Unis contre la voie
de la résistance, accusée du coup de servir les intérêts de l’Iran et de la
Syrie.

Il est étonnant de voir comment, dès les premiers jours après la mainmise du
Hamas sur les locaux des appareils sécuritaires, les voix des éradicateurs et
des autres, par ignorance ou non, se sont multipliées pour dénoncer le rôle de
l’Iran dans les événements. Que l’Etat sioniste déclare son soutien à la
présidence, que les Etats-Unis et l’Europe applaudissent aux décrets
anticonstitutionnels de Mahmoud Abbas, ne les gênent pas. Ils ne considèrent pas
cela comme une intervention effrontée dans la vie politique palestinienne. Ce
qui les gêne, ce sont les voix modérées qui réclament le dialogue, l’unité, le
respect de la légalité en Palestine. De Palestine, de l’Egypte et de la
Jordanie, des personnalités politiques extrémistes s’insurgent contre une telle
demande : elles ne veulent pas l’unité des Palestiniens mais veulent éradiquer,
elles ne veulent pas appliquer la légalité (le respect du conseil législatif) et
accusent tour à tour l’Iran ou la Syrie, ou les deux à la fois, de soutenir le
Hamas. Le ministre égyptien des affaires étrangères ose même déclarer, sans
craindre le ridicule, qu’il ne permettrait pas à l’Iran de menacer sa sécurité
par le biais d’un Etat islamique à Gaza. Tout récemment, un journaliste se
posait d’ailleurs la question de comment l’Iran pouvait intervenir dans les
affaires de Gaza, sans passer précisément par l’Egypte ? Azzam Ahmad,
représentant du Fatah au conseil législatif, Ahmad Abdel Rahman, conseiller du
président, Yasser Abed Rabbo, tranfuge du FDLP, promu au rang de chef de
l’exécutif de l’OLP et principal signataire des accords honteux de Genève
(abandon de la souveraineté sur al-Quds et remise en cause du droit au retour
des Palestiniens) proclament à tour de rôle que le Hamas applique le rôle
stratégique de l’Iran en Palestine, s’appuyant sur une déclaration iranienne
souhaitant le respect de la légalité.

Cette situation rappelle très précisément celle qui prévaut au Liban. Pour
éviter tout dialogue ou toute issue à la crise politique, le pouvoir accuse
régulièrement, comme un leitmotiv, les forces de l’opposition de représenter les
intérêts géostratégiques iraniens au Liban. Même le général Aoun est devenu, aux
yeux des gens du pouvoir, un ardent défenseur de l’Iran. Que l’Iran dise ou ne
dise pas un mot, fasse ou ne fasse pas un geste, la même rengaine est chantée :
l’Iran intervient dans les affaires libanaises et tient le Liban en otage dans
son conflit avec les Etats-Unis. Mais ils ne se posent pas la question de savoir
pourquoi les Etats-Unis ont le droit, par le biais de leurs envoyés ou de leur
ambassadeur, d’intervenir dans les affaires du Liban, pourquoi le tiennent-ils
en otage avec la menace d’une guerre civile, reportée mais jamais enterrée,
chaque fois que l’opposition fait un pas en direction du pouvoir ?

Ces forces pro-américaines, qu’elles soient au Liban ou en Palestine, ne
craignent pas la guerre civile. Elles y appellent de toutes leurs forces pour
éviter le passage pacifique des forces de la résistance au pouvoir. Les forces
de la résistance sont accusées de tous les maux, et un responsable palestinien
installé à Paris n’hésite pas à qualifier le Hamas de « talibans », comme si
cette accusation pouvait encore avoir de l’effet ou égratigner nos âmes, après
les horreurs des envahisseurs occidentaux en Afghanistan ou en Irak. Mais le
message est clair : c’est un appel au monde occidental affirmant d’une part que
les Palestiniens ou Libanais qui piétinent la légalité sont « civilisés » et
d’autre part, que les forces de la résistance, légalement arrivées au pouvoir et
dont la légitimité a été acquise par le devoir de résistance à l’occupation,
doivent subir la colère des empires coloniaux.

Le discours musclé de Mahmoud Abbas contre le Hamas ne laisse aucun doute : il
s’agit bel et bien d’un appel à Israël, aux Etats-Unis et à l’Union européenne
de faire la guerre ouverte au Hamas, et notamment contre la bande de Gaza.

La présidence palestinienne et surtout ses conseillers et éradicateurs ne
veulent même pas que la Ligue arabe joue un rôle pour rapprocher les points de
vue, entamer une discussion sérieuse et colmater les brèches. Cette nouvelle
attitude veut rompre avec tout ce qui peut modérer, préférant au contraire
l’alignement extrémiste sur les Etats qui, au sein de la Ligue arabe, poussent
vers l’éclatement de la société palestinienne et le recul de la cause
palestinienne. Au dernier conseil de la ligue arabe, les Etats se prononcent
pour le soutien à la légalité palestinienne, représentée par la présidence et le
conseil législatif. Au cours de la lecture du communiqué final, le délégué
jordanien, s’imaginant dans une cour de récréation, « avale » les termes parlant
du conseil législatif, voulant faire passer le communiqué pour un soutien
unilatéral à la présidence.

C’est contre ce chemin dangereux et sans issue, sinon l’éclatement de la société
palestinienne, que les forces nationales essaient de résister : le Hamas ne
cesse de réclamer la voix de la raison, appelle à la discussion, demande une
rencontre et une commission d’enquête et déclare être prêt à remettre les sièges
des appareils sécuritaires. Le FPLP refuse d’entériner certaines décisions très
graves du conseil central de l’OLP, réuni à Ramallah récemment : refus
d’entériner la formation d’un gouvernement d’urgence, jugé illégal, refus
d’entériner la mise au pas du conseil législatif élu et refus d’entériner les
derniers décrets présidentiels, graves atteintes aux droits civiques
palestiniens, remettant en cause la liberté d’association. Quant au Fatah, il
semble tellement éclaté entre plusieurs courants que les voix réelles de la
résistance qui y existent ne parviennent pas encore à s’exprimer.

Le Hamas, comme le Hizbullah au Liban, sont puissants par le soutien populaire
qu’ils mobilisent. Ce ne sont ni l’Iran, ni la Syrie, ni les Talibans ou Chavez
qui les maintiennent en vie et leur permettent de gagner les cœurs des peuples
et de revendiquer leur place dans la société. C’est d’abord leur stratégie de la
résistance à l’entité sioniste qui a mobilisé non seulement leurs peuples à
leurs côtés mais de vastes pans des sociétés arabes et musulmanes, avant d’être
heureusement soutenus par des régimes, arabes ou musulmans et même au-delà, par
intérêt ou par sympathie. Devant cette poussée criminelle américano-sioniste qui
est prête à démanteler des sociétés par des guerres civiles ou par la partition
ds territoires, pour ne pas entériner la légalité de la résistance, il est
évident que les deux principales forces de la résistance doivent être attentives
à tout faux pas, qui risque d’être chèrement payé.

Face aux éradicateurs et dilapideurs des acquis des peuples dont le ton guerrier
montre essentiellement leur faiblesse, elles ont tout à gagner dans la période à
faire échouer les plans des Américains Dayton et Welsh, à rassembler les peuples
autour de leur projet de résistance contre l’Etat sioniste, en maintenant leur
esprit d’ouverture vers les autres couches de la population et empêcher coûte
que coûte le démantèlement social. L’espoir de libération mis par les peuples
arabo-musulmans dans ces forces doit les amener à la prudence et à considérer
que cette phase cruciale réclame autant, sinon plus d’attention, que la lutte
armée légitime contre l’Etat sioniste.

(à suivre)

Centre d'Information sur la Résistance en Palestine



02/07/2007
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