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Légalité et légitimité de la résistance (III)

Légalité et légitimité de 
la résistance 

3 – Aider Israël ou comment rendre la résistance illégale
 
Il y a un an, les résistants palestiniens kidnappaient un soldat israélien dans
un opération remarquable par son organisation, l’opération « Illusions dissipées
» où un soldat fut capturé en vue de l’échanger contre des prisonniers
palestiniens, plus de 10.000 prisonniers palestiniens étant détenus pour des
motifs politiques. 

Cette opération intervint en plein blocus meurtrier américano-sioniste contre le
peuple palestinien et l’enfermement des Palestiniens de la bande de Gaza, par
air, par mer et par terre. L’armée sioniste reprend ses attaques meurtrières et
commet les massacres de Beit Hanoun, aidée par des officiers américains. Mais, à
part massacrer et détruire, Israël ne parvint ni à libérer son soldat ni à
porter des coups à la résistance héroïque de Beit Hanoun. Peu après, la
résistance du Hizbullah au Liban menait une opération similaire « Promesses
sincères », à la frontière nord, toujours dans le même but d’échange de
prisonniers. Là aussi, Israël se lance dans une guerre meurtrière, soutenue par
les puissances occidentales et des régimes arabes, il commet des dizaines de
massacres, détruit infrastructures et maisons, sans parvenir à faire plier la
résistance, qui sort plus victorieuse que jamais.

Les victoires remportées par les résistances palestinienne et libanaise ont fait
peur, non seulement à Israël et ses alliés internationaux, mais aux régimes
arabes et à certaines élites politiques et intellectuelles arabes, au Liban et
en Palestine inclus. 

Ils ont refusé ces victoires (minimes certes par rapport à l’objectif de la
libération de la Palestine, mais importantes et significatives dans le cadre du
rapport de force actuel) et ont agi, avec toute leur énergie, en symbiose totale
avec les Etats-Unis, l’Union européenne et les forces coloniales dans le monde,
pour réduire l’impact de ces victoires. Impact sur Israël, d’abord, en faisant
des concessions gratuites à l’Etat spoliateur afin de l’aider à se relever après
sa double défaite, mais impact aussi sur les sociétés palestinienne et libanaise
en minimisant la portée de la résistance (voir les réactions de ces élites et
régimes au rapport Vinograd, où seul l’aspect « démocratique » de l’Etat
sioniste fut pris en considération).
 
En Palestine, ce sont, entre autres, les atermoiements de l’Autorité sur le
dossier des prisonniers, les efforts faits par les appareils sécuritaires pour
retrouver et remettre gratuitement le soldat capturé aux autorités sionistes,
donnant ainsi à l’Etat d’Israël le droit de gérer et de diriger lui-même les
négociations, comme si la résistance n’avait aucun poids ou comme si elle avait
commis un acte illégal. Ce sont aussi toutes les déclarations présidentielles
dénonçant les opérations militaires et les frappes sur Sderot et autres colonies
autour de Gaza, voulant les faire passer pour des actes violents et illégaux. En
fait, la résistance a gêné ces élites politiques qui auraient pu s’y appuyer, si
elles n’avaient pas entièrement abandonné l’esprit de la lutte de libération,
pour entamer des négociations la tête haute, puisque telle est leur démarche.
C’est la « stratégie de la négociation », l’unique stratégie développée par
Mahmoud Abbas et son équipe, rompant ainsi avec la stratégie du martyr Arafat
qui a mené de front deux stratégies, jusqu’au dernier souffle de sa vie.

Au Liban, un situation presque identique se met en place pour limiter le poids
de la victoire, afficher profil bas face aux Etats-Unis et aux puissances
étrangères, mendier de l’argent au lieu de réclamer des réparations, refuser de
dénoncer les crimes israéliens mais dénoncer la résistance, faire tout pour
faire croire que le Liban (le Hizbullah) fut l’agresseur et Israël la victime.
Ce fut la tâche du gouvernement de Sanioura devenu anticonstitutionnel après la
démission du plus d’un tiers de ses membres.

Tous les efforts de ces Arabes vont dans le sens de délégaliser et délégitimer
les résistances, ou la voie de la résistance, aux yeux des peuples arabes,
faisant croire encore une fois que les différents territoires occupés par l’Etat
sioniste seraient libérés par la voie diplomatique et par les rencontres au
sommet, que ce qu’ils qualifient de violence et même terrorisme serait néfaste
aux peuples avant tout et à la stabilité régionale. Ils se posent alors en
volontaires pour défendre cette stabilité qui permet à l’Etat sioniste de
reprendre son souffle et même son offensive militaire et politique contre le
peuple palestinien et les organisations de la résistance. Ils justifient leur
rôle en accusant l’Iran et la Syrie de vouloir déstabiliser la région, mais
n’accusent jamais Israël, les Etats-Unis ou l’Europe de plonger la région dans
un gouffre.

Le constat auquel on aboutit en septembre 2006 est que nous sommes effectivement
dans une nouvelle phase, où une partie des Etats arabes, sinon la majorité, mais
aussi certaines élites politiques en Palestine et au Liban font partie prenante
de l’axe américano-sioniste, préférant leur propre défaite à celle de l’Etat
sioniste ou plus correctement, considérant que la défaite des sionistes signifie
la leur. Avec l’aide américaine, ils forment le Quartet arabe mais aussi
d’autres alliances en vue de maintenir la suprématie israélienne dans la région,
maintenir leur propre asservissement aux intérêts américano-sionistes et trouver
les moyens de briser les résistances, en limitant leur influence dans leurs
propres pays et en les impliquant dans des guerres fratricides. C’est ce qui
s’est passe avec les plans Welsh et Dayton. Au Liban, déstabilisation
sécuritaire et sociale, menace d’éclatement du pays, armement des milices des
forces gouvernementales (Geagea, Jumblatt, Hariri) et en Palestine, où
l’occupation sioniste sévit, l’anarchie sécuritaire se développe à l’ombre des
milices armées dont personne ne sait plus pourquoi elles le sont et contre qui
elles dirigent leurs armes. Dans la bande de Gaza, nous voyons réapparaître les
conflits familiaux réglés par balles et les enlèvements des étrangers, les
appareils sécuritaires de l’Autorité sont de plus en plus financés par les
puissances étrangères, prêtes à payer pour des moyens sécuritaires tout en
poursuivant un blocus meurtrier contre le peuple et ses institutions civiles,
avec en fond un crise politique dans les deux pays. 

Si au Liban, les forces du gouvernement ont, depuis le mois de septembre, opté
ouvertement pour le discours extrémiste et se montrent prêtes, fortes du soutien
américain et français, à aller vers une guerre civile plutôt que s’entendre avec
l’opposition, la situation n’a pas été la même en Palestine, même si certaines
élites furent séduites par l’exemple libanais. Car la Palestine gît toute
entière sous l’occupation et à moins d’un retrait significatif des territoires
occupés, la libération significative de prisonniers, la cessation de
l’implantation de colonies et la destruction du mur de l’annexion, aucune voix
palestinienne ne peut s’allier avec le gouvernement sioniste. 

A notre avis, la comparaison faite par des journalistes ou forces politiques
entre le gouvernement de Mahmoud Abbas ou les forces sécuritaires d’une part et
le collaborateur-traître Lahd au sud-Liban (général libanais ayant administré
pour le compte des sionistes de vastes territoires du sud-Liban entre 1978 et
2000 et qui vit actuellement dans l’Etat sioniste, avec ses proches
collaborateurs) n’est pas exacte. Ni Mahmoud Abbas, ni même Dahlan ne sont des
Lahd, mais ce sont tout simplement des Sanioura, des Jumblatt et Geagea, et
c’est amplement suffisant. On ne règle pas un conflit avec ces nouvelles forces
pro-américaines, soutenues par des régimes arabes, comme on règle le sort de
Lahd, bien qu’il y ait des Lahd parmi les Palestiniens, qui doivent être jugés
pour collaboration avec l’ennemi par les forces légales palestiniennes. 
 
Dans cette ambiance qu’ils ont rendue défaitiste, les Etats arabes se
rencontrent pour un sommet, à Riyad, début avril 2007 et où ils envisagent, en
plus des concessions faites au sommet de Beirut, de remettre en cause le droit
au retour des réfugiés, d’une manière claire et sans ambiguité. Il a fallu une
mobilisation importante des communautés palestiniennes dans le monde appuyée par
quelques Etats pour que le sommet arabe ne fasse aucune déclaration à ce sujet,
tout en faisant des concessions supplémentaires aux sionistes, avec
l’institution d’une commission, avec l’Egypte et la Jordanie, pour normaliser
les relations avec l’Etat spoliateur. 

Mais ces molles résolutions qui, de l’avis de plus d’un commentateur arabe, sont
bien en-deça de ce que peuvent réclamer les Etats arabes après une cuisante
défaite israélienne, restent insuffisantes pour Israël. 

Juste après ce sommet arabe, Livni, ministre de l’Etat sioniste aux affaires
étrangères se rend en Egypte pour déclarer que « le plan arabe de paix » ne peut
être accepté avant que la clause du droit au retour des Palestiniens ne soit
supprimée. 

Les déclarations des responsables sionistes sont décisives et peuvent aider à
comprendre pourquoi le camp palestinien de Nahr el-Bared, au Liban, a subi le
dernier assaut. Il est vrai que le groupe de Fateh el-Islam fut installé dans le
camp pour servir un agenda libanais, créer une situation conflictuelle avec les
forces de la résistance, libanaise et palestinienne à la fois. Mais l’agenda
arabe intervient après le mois d’avril pour faire du camp de Nahr el-Bared un
laboratoire d’essai en vue de :

1) remettre en cause les accords du Caire de 1969 qui régissent la présence
armée palestinienne au Liban, 
2) démanteler « légalement » un camp palestinien et disperser sa population
entre installation définitive au Liban et exil vers d’autres pays. 
3) affaiblir l’armée libanaise et la rendre dépendante de l’aide américaine.

Un mois après le début de la destruction du camp palestinien, dont la population
s’élevait à 45.000 personnes environ, que reste-t-il ? 

- Un camp entièrement détruit avec une approbation populaire inégalée au Liban
pour ce genre d’actes, puisqu’il s’agit d’un « lutte nationale contre le
terrorisme ». La question posée par Sayyid Nasrullah, au début de la destruction
du camp, reste légitime : s’il s’était agi d’un village libanais, aurait-il été
détruit de la même manière ? 
– Plus de 40.000 réfugiés palestiniens ont tout perdu et sont dispersés dans
plusieurs camps du Liban, et surtout dans le petit camp de Baddawi, déjà
surpeuplé. 
– Il n’est pas certain que les réfugiés puissent revenir au camp après la fin
des combats, puisque le gouvernement libanais de Sanioura parle de quartiers
piégés (comme au sud-Liban, où Israël a déversé des tonnes de bombes juste avant
la fin de sa guerre, pour empêcher la population de retourner). Mais
contrairement aux Libanais du Sud qui sont quand même retournés, bravant les
bombes et ceux qui les ont lancés, la population de Nahr al-Bared ne peut braver
l’armée libanaise et une opinion devenue hostile à la présence palestinienne
dans le nord, faisant porter la responsabilité de ce qui s’est passé à
l’ensemble des Palestiniens. 

La bataille de Nahr el-Bared est un laboratoire d’essai pour les réfugiés
palestiniens au Liban. Pour rayer le droit au retour des réfugiés, il est
nécessaire de démanteler leur présence, en tant que réfugiés, dans les pays
arabes, et le Liban est le pays où cette question est la plus cruciale, étant
donné que leur présence est particulière : sans droits civiques mais avec des
droits politiques inespérés dans d’autres pays arabes accordés par les accords
du Caire. 

La destruction du camp et ses implications politiques risquent d’inverser les
droits : suppression des accords du Caire tout en accordant des droits civiques
élargis à une partie de la population palestinienne, le reste étant conviée à
aller vivre et travailler ailleurs. 

Les porte-paroles au Liban de ce plan diabolique visant le droit au retour des
Palestiniens sont nombreux, rassemblant les anciens ennemis des Palestiniens
comme Geagea et les anciens « amis » comme Hariri, dont le père martyr avait
déjà étudié le plan de leur installation définitive, moyennant finances. Ce
n’est pas fortuit que plusieurs voix s’élèvent pour parler des accords du Caire,
à ce moment, remettant en cause la présence militaire et militante palestinienne
au Liban. Et, pour rendre les choses plus complexes encore, il semblerait que le
Fateh au Liban, du moins son porte-parole, et même la représentation de l’OLP,
ne soient pas si étrangers à l’application de ce plan.

Sinon, comment comprendre leur empressement à préférer la solution militaire à
la solution politique, alors que la solution militaire signifie la destruction
du camp, comment comprendre les accusations portées contre le délégué de l’union
des ulémas palestiniens, l’accusant de connivence avec Fateh al-Islam, alors
qu’il essayait de négocier la fin des combats et la reddition de ces derniers ?
Comment comprendre ces prises de position unilatérales du représentant du Fateh,
hors de l’unanimité palestinienne représentée par toutes les organisations
palestiniennes, et qui participerait, semble-t-il, aux côtés de l’armée
libanaise aux combats en cours ?

La crise palestinienne dans les territoires occupés ajoutera à cette complexité,
lorsque ce représentant du Fateh menacera le Hamas au Liban, attaquera ses
locaux à Baddawi et organisera une manifestation contre le Hamas à Rashidiyyeh
au sud-Liban, comme s’il voulait déclencher une guerre inter-palestinienne dans
les camps du Liban, au moment où la situation née de la destruction du camp de
Nahr el-Bared exige une entente palestinienne générale pour protéger les acquis
palestiniens dans ce pays déjà en crise.
 
Simultanément à la situation dans les territoires occupés et au Liban, où la
voie de la résistance est visée, et notamment dans les camps palestiniens où
c’est le droit au retour des réfugiés qui semble menacé, l’Etat sioniste
déclenche sa propre guerre interne contre les Palestiniens de 48, en portant de
graves accusations contre Azmi Bishara, député et président du Rassemblement
national démocratique. 

Au-delà de Azmi Bishara, c’est l’expression et la résistance politiques des
Palestiniens de 48 qui sont menacées. Israël, secouru par les puissances
occidentales et leurs amis arabes, se lance à l’assaut des droits palestiniens,
acquis grâce aux luttes populaires depuis les années 50. Il s’agit là aussi de
délégaliser la résistance politique des Palestiniens de 48 en la faisant passer
pour une atteinte sécuritaire surtout que depuis 2000, cette résistance
politique a fait de grands pas en avant, en mobilisant de larges secteurs des
Palestiniens, sur les thèmes de la défense de la terre et des droits nationaux,
la défense des lieux saints, la lutte pour le droit au retour des réfugiés, la
liaison et le rattachement du sort avec tous les palestiniens, des territoires
occupés et de l’exil. 

C’est leur place dans l’OLP qu’ils revendiquent de plus en plus, en tant que
partie intégrante du peuple palestinien. C’est contre la montée d’une telle
force à l’intérieur même de l’entité sioniste que ses appareils sécuritaires ont
donné l’assaut d’abord contre Sheikh Raed Salah en 2002, puis récemment contre
Azmi Bishara.

Là aussi, la plupart des pays arabes ont non seulement abandonné les
Palestiniens de l’intérieur, mais ont souscrit à l’idée d’un Etat juif pour les
Juifs. Dans une récente interview du secrétaire général du Jihad islamique par
la chaîne al-Jazeera, à propos de la crise palestinienne actuelle, Ramadan
Abdallah Shallah s’étonne de l’attitude de certains pays arabes prêts à
reconnaître et à vivre aux côtés d’un Etat juif, au moment où ils brandissent
l’épouvantail d’un « Etat islamique à Gaza » qui serait, d’après eux, le projet
du Hamas. 
 
La vague américaine en guerre contre le « terrorisme » a finalement gagné à elle
certaines élites et certains régimes arabes, qui craignent pour leur audience ou
survie avec l’avancée de la résistance. Ces régimes et ces élites, notamment
dans les pays les plus concernés comme la Palestine et le Liban, préfèrent
maintenir la domination sioniste plutôt de voir la région déstabilisée du fait
de la victoire de la résistance. Ils sont prêts à déclencher des guerres
internes et civiles, à morceler des territoires plutôt que de permettre à la
voix de la résistance, légale et légitime, d’avancer vers le pouvoir. Mais ils
sont pressés, car pour se maintenir eux-mêmes au pouvoir et gagner leur
popularité, ils doivent acquérir les droits spoliés, que ce soit en Palestine et
au Liban. 

La rencontre de Sharm el-sheikh du lundi 25 juin 2007 a  montré les limites
auxquelles ils peuvent espérer et les failles de leur stratégie. Bien que
Mahmoud Abbas ait dénoncé « la violence et le terrorisme », Olmert n’a voulu
rendre qu’une partie de l’argent volé à l’Autorité, de quoi obliger celle-ci à
mendier et triste sort, seuls 250 prisonniers du Fatah « dont les mains ne sont
pas entâchées de sang » seront libres, sur les 12.000 prisonniers palestiniens.
Mais il a évidemment promis son « soutien » politique, sans aborder ni les
incursions, ni les barrages, ni les colonies, ni la judaïsation d’al-Quds. Il en
faut certainement plus pour le pouvoir de Mahmoud Abbas et son gouvernement
anticonstitutionnel s’ils veulent gagner le peuple palestinien et éradiquer
l’influence du Hamas, comme le promettent les éradicateurs. Mais peuvent-ils
vraiment amener, malgré toutes les concessions faites, Israël à rendre quelque
chose de significatif et de valable, même en mobilisant à leurs côtés les
puissances internationales ? Et d’ailleurs, pourquoi celles-ci se
mobiliseraient-elles à leurs côtés quand ils se sont eux-mêmes liés d’avance les
mains et les pieds en tournant le dos à la stratégie de la résistance ?
 
C’est par sa connaissance profonde de la nature de l’Etat sioniste, qui ne rend
rien, que contraint et forcé par les armes, que la résistance a gagné et gagnera
la bataille, malgré la mobilisation de toutes les forces et élites
pro-américaines dans la région. La résistance n’est pas pressée, elle a l’avenir
pour elle. Il lui faut juste savoir examiner les phases de la longue bataille et
agir en conséquence, pour préserver ses forces et les maintenir dirigées contre
l’Etat sioniste spoliateur.
 
FIN
 
Centre d'Information sur la Résistance en Palestine


02/07/2007
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